Nouveau Montparnasse : l’arbre qui cache la shopping city

[Avec David Belliard, candidat des écologistes à la Mairie de Paris, et des militant.e.s des 14e, 6e et 15e arrondissements, j’ai signé cette tribune dans le Huffington Post le 26 juillet 2019].

Le projet de Nouveau Montparnasse est l’arbre qui cache la « shopping city »: alors que Paris surchauffe, nous dénonçons une écologie en trompe-l’oeil.

Le 11 juillet dernier, la ville de Paris et les copropriétaires de l’ensemble immobilier Maine Montparnasse ont dévoilé le projet qu’ils ont choisi pour le réaménagement de la dalle Montparnasse: celui du cabinet Rogers Stirk Harbour + Partners.

Dans un contexte de réchauffement climatique qui se précise chaque jour davantage et se manifeste par des canicules à répétition dont Paris surbitumée est la première à souffrir, ce projet porté par des acteurs publics et privés ne nous paraît pas à la hauteur des enjeux qui imposent une façon radicalement nouvelle de penser l’aménagement urbain.

À première vue, certains gestes architecturaux sont à saluer, comme la volonté affichée de créer des continuités visuelles dans un quartier où le regard butte souvent sur un urbanisme terne et obsolète. Mais à regarder dans le détail, le projet ne rompt pas avec une vision de la ville centrée sur la recherche de toujours plus d’attractivité commerciale et économique, qui est incompatible avec la préservation du climat et les actions nécessaires à la résilience de la ville face aux conséquences du dérèglement climatique. 

Nous ne voulons pas d’un centre commercial à ciel ouvert!

Trois-quarts des surfaces des bâtiments sont prévues pour accueillir des bureaux et des commerces. Sans compter le doublement des surfaces commerciales du centre Gaîté, la multiplication des magasins dans la gare Montparnasse, et les commerces prévus dans la nouvelle Tour. C’est donc bel et bien un projet de shopping city qui nous est présenté aujourd’hui. Une shopping city anonyme comme il pourrait en exister dans n’importe quelle capitale, qui ne tient pas compte non plus des particularités culturelles du quartier. Une shopping city synonyme de toujours plus de consommation, donc d’émissions de gaz à effet de serre.

« Le projet ne rompt pas avec une vision de la ville centrée sur la recherche de toujours plus d’attractivité commerciale et économique, incompatible avec la préservation du climat et les actions nécessaires à la résilience de la ville face au réchauffement. »

Certes, l’accent est mis sur la plantation d’arbres (on nous en promet 2500), mais sans que l’on sache précisément combien seront plantés dans le périmètre, et dans quelle mesure les arbres déjà existants sont comptabilisés. Au final, combien d’arbres supplémentaires seront plantés? Combien en pleine terre? Combien en remplacement des arbres supprimés?

De même, les serres prévues sur certains immeubles présentent un potentiel intéressant en termes d’agriculture urbaine mais ne permettront pas de participer véritablement au rafraîchissement de la Ville. 

Une densification toujours plus importante dans un quartier déjà saturé

Ces touches végétales ne peuvent masquer l’augmentation de la densité prévue: 18.000 m² de surface de plancher supplémentaires, et une Tour Montparnasse élargie sur les 13 premiers étages et ouverte 24h/24 pour pouvoir accueillir deux fois plus de monde qu’aujourd’hui. Il en est de même  pour le projet de rénovation de la tour CIT qui prévoit une  augmentation de sa capacité d’accueil, gagnant en épaississement. Les nouvelles constructions viennent aussi mordre sur l’espace public, que ce soit côté rue du départ ou sur la place du 18 juin.

« La priorité doit être de dé-densifier. Vivre mieux plutôt que consommer toujours plus. »

Une hausse de la fréquentation du quartier entraînera nécessairement une saturation des réseaux de transport, déjà à la limite de la thrombose, comme les lignes 12 et 13 du métro. À ce stade du projet, aucun véritable schéma fonctionnel en matière de transport n’est prévu pour répondre aux flux à prévoir.

Les écologistes appellent donc la ville de Paris, en lien avec les copropriétaires de l’ensemble immobilier Maine Montparnasse, à prendre ses responsabilités financières et réglementaires sur ce dossier. La priorité doit être de dé-densifier, pour créer de véritables îlots de fraîcheur et de respiration. Il faut plus d’espaces pour les enfants, pour les familles, pour les personnes âgées, pour la culture, les services publics, les loisirs et la vie de quartier. Vivre mieux plutôt que consommer toujours plus, voilà l’enjeu qui doit présider à la rénovation du quartier. Une telle occasion de repenser le quartier Montparnasse ne se représentera pas de sitôt et les écologistes demandent en conséquence l’ouverture d’une phase ambitieuse de concertation avec les habitant.e.s, et s’y impliqueront pleinement dans les prochains mois.

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Les signataires de cette tribune sont:

Guillaume Durand (co-secrétaire EELV Paris), Sinda Matmati (candidate écologiste dans le 14ème arrondissement), Antoinette Kis et Mathurin Gallice-Gentil (candidat.e.s écologistes dans le 6ème arrondissement), Thibaut Bragé (candidat écologiste dans le 15ème arrondissement), Louis Jouve (EELV Paris 6e), Catherine Marie (EELV Paris 6e), Dominique Leclercq (EELV Paris 14e), Florian Milesi (EELV Paris 14e), Arnaud Périgord (EELV Paris 14e)

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